Perché au-dessus du Vieux-Port, le Sofitel Marseille Les Trois Forts n’est plus ce lieu réservé aux seuls voyageurs. Sous l’impulsion du chef marseillais Sylvain Touati, il s’affirme comme une table élégante et ouverte, où la Méditerranée s’exprime avec sincérité et gourmandise.

Photo 7deTable.com
Comme le majestueux hôtel présent depuis presque une cinquantaine d’années sur les hauteurs du Vieux-Port, on pourrait croire qu’il est là depuis toujours.
Natif de Marseille, élevé dans le quartier d’Endoume, Sylvain Touati porte en lui les parfums et les couleurs de la Méditerranée. Formé à l’Institut Lyfe, passé par de belles maisons parisiennes, par Dijon, mais également aux côtés de Lionel Lévy, figure de la gastronomie marseillaise (parti désormais sur l’île de Bendor, au large de Bandol), il est arrivé au printemps 2024 pour prendre la tête des Trois Forts, le restaurant gastronomique du Sofitel Vieux-Port.
Ce qui frappe, c’est cette volonté de défendre une cuisine simple et précise, qui magnifie l’ingrédient local. Dans un hôtel international où la tentation est grande de plaire à tout le monde, le chef revendique une identité résolument marseillaise. Cela se traduit jusque dans les détails : le saumon fumé, par exemple, a disparu du petit-déjeuner, remplacé par une spécialité méditerranéenne, avec un petit panneau explicatif sur la protection des océans. « Les clients comprennent et préfèrent ça » nous explique-t-on.
L’hôtel, ouvert sur la ville, a pourtant longtemps été perçu comme un lieu réservé aux voyageurs. « Peu de gens savent que le restaurant est accessible aux locaux », reconnaît la direction. L’image change. Depuis fin 2022, l’arrivée d’un nouveau directeur a réuni sous une seule gouvernance le Sofitel et le Novotel voisins. Par un heureux « hasard », les deux restaurants ont lancé leur nouvelle carte en même temps. Et comme un clin d’œil, chacun a imaginé une entrée autour de la tomate… mais avec des approches radicalement différentes. Deux personnalités, deux univers, deux visions.
Les deux chefs ne travaillent ensemble qu’une fois par an, à l’occasion du Couscous Festival de Marseille, qui impose chaque année un thème différent « C’est le seul moment où ils collaborent, sinon chacun garde sa signature ».
Pour séduire les habitants, une offre qui donne envie de revenir régulièrement. Objectif : briser l’image « très gastro » et intouchable des Trois Forts. Ici, on continue d’accueillir mariages, anniversaires et grands événements familiaux, mais on veut aussi que les Marseillais viennent simplement par envie.
La grande salle, baignée de lumière, offre une vue à couper le souffle sur le Vieux-Port. C’est l’un de ces panoramas que l’on garde en mémoire toute une vie. Depuis quarante-cinq ans, des générations de Marseillais y sont passées, emportant avec elles ce souvenir unique : celui de se sentir, l’espace d’un repas, comme un oiseau de la Méditerranée prêt à s’élancer au-dessus de la ville.
Au déjeuner, un joli menu à 49 euros (Entrée - Plat - Dessert) permet ainsi d’avoir un bel aperçu de la cuisine du chef. Ainsi, en entrée, un gravlax de maigre, accompagné d’œufs de tobiko (poissons volants), de focaccia et de tomates. Le poisson, mariné avec justesse, garde une texture soyeuse et une belle profondeur iodée. Le « craquant » des tobiko, la douceur des petites tomates cerise jaune et rouge et le moelleux de la focaccia composent un ensemble à la fois frais, précis et marqué par une jolie touche d’umami.
Vient ensuite le poulpe, présenté en tentacules entier. Cuit avec une belle maîtrise – ni caoutchouteux, ni trop tendre – il révèle toute sa saveur. Le mariage avec les pois chiches, clin d’œil évident à la Méditerranée et à Marseille, fonctionne parfaitement. La feta apporte une note lactée et légèrement salée, tandis que le gel de citron vient réveiller l’ensemble avec une acidité maîtrisée, donnant du relief au plat.
En dessert, les pêches à l’orgeat se présentent comme une caresse en fin de repas. La mousse de verveine est aérienne. Entre la rondeur sucrée de la pêche et la pointe d’amande de l’orgeat, l’équilibre se trouve sans effort. Un final tout en légèreté.
À la carte, après une délicieuse revisite d’une salade de tomates de Provence, pain frit au crabe vert, eau de tomate à la vanille, nous avons adoré un plat Bœuf Morucha de St Martin de Crau, jarret braisé en ravioles, jus de daube, mousseline d'artichauts épineux, jaune d’œuf. Ce n’est peut-être pas un plat d’été au sens strict, mais c’est sans doute l’un de ces plats de mémoire, d’une gourmandise si juste qu’il restera longtemps gravé dans l’expérience.
Loin d’être une forteresse perchée au-dessus du Vieux-Port, Les Trois Forts se veut aujourd’hui un lieu de partage, ancré dans Marseille et ouvert à tous. Avec un chef qui porte en lui l’âme méditerranéenne et une équipe qui cultive le lien humain comme un ingrédient essentiel, l’adresse conjugue élégance et authenticité.
Sofitel Marseille Vieux-Port
Les Trois Forts
36, bd Charles-Livon
13007 Marseille
Mots-clés : Marseille - Restaurant - Gastronomique