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Situation dangereuse au Yemen : les deux tiers de la population peinent à se nourrir

Ecrit par Syrah Merlot de Bergerac le 10.02.2017

Yémen : Face à l’aggravation de la crise alimentaire, les organisations de l'ONU demandent une aide urgente afin d’éviter une catastrophe. Une évaluation conjointe révèle que deux tiers de la population peine à se nourrir en raison du conflit en cours.


1996-Yemen people
Werner Bayer, domaine public
 

Selon une évaluation réalisée par les trois organisations des Nations Unies, le nombre de personnes en situation d'insécurité alimentaire au Yémen a augmenté de 3 millions en l'espace de sept mois, avec en parallèle 17,1 millions de personnes qui peinent à se nourrir. Parmi les 17,1 millions de personnes en situation d'insécurité alimentaire, 7,3 millions d'entre elles ont besoin d'une aide alimentaire d'urgence.
 

Les résultats préliminaires de l'Evaluation de la sécurité alimentaire et de la nutrition en situations d'urgence (EFSNA) indiquent que l'insécurité alimentaire et la situation nutritionnelle s'aggravent rapidement en raison du conflit en cours. Plus des deux tiers de la population yéménite, qui compte 27,4 millions de personnes, souffrent du manque d'accès aux denrées alimentaires et, par conséquent, ont un régime alimentaire inapproprié.


L'EFSNA est une étude conjointe menée par l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) et le Programme alimentaire mondial (PAM), en coopération avec les autorités yéménites. Il s'agit de la première évaluation nationale réalisée auprès des ménages à travers le pays depuis la mi-mars 2015, période marquée par l'escalade du conflit.
 

Dans quatre gouvernorats, les taux de malnutrition aigüe ont dépassé le seuil «critique», tandis que la production agricole a baissé sur l'ensemble du territoire.


«La vitesse à laquelle la situation se détériore et la hausse spectaculaire du nombre de personnes confrontées à l'insécurité alimentaire sont extrêmement préoccupantes», a déclaré M. Salah El Hajj Hassan, Représentant de la FAO au Yémen. «Il faut garder à l'esprit que l'agriculture représente la principale source de moyens d'existence pour la majorité de la population, la FAO demande des fonds supplémentaires de manière urgente afin de renforcer son soutien aux moyens d'existence agricoles, pour les agriculteurs, les éleveurs et les communautés de pêcheurs, d'améliorer leur accès à l'alimentation en 2017 et d'empêcher une nouvelle détérioration des moyens d'existence ainsi qu'une nouvelle aggravation de la sécurité alimentaire».
 

«Dernièrement au Yémen, nous avons été témoins des taux de malnutrition les plus élevés jamais atteints chez les enfants. Si non traités à temps, les enfants souffrant de malnutrition grave et aigüe ont 11 fois plus de chances de mourir que les enfants de la même tranche d'âge en bonne santé. Même s'ils survivent, ces enfants ont de fortes chances de ne pas se développer pleinement, ce qui pose une menace sérieuse sur une génération entière au Yémen et contribue à laisser le pays coincé dans le cycle vicieux de la pauvreté et du sous-développement», a déclaré le Dr. Meritxell Relano, Représentant de l'UNICEF au Yémen.
 

«Jamais au Yémen les souffrances liées à la faim n'avaient atteint un tel niveau, ce qui se traduit par de graves privations et des répercussions néfastes pour des millions de yéménites, en affectant particulièrement les groupes vulnérables», a indiqué M. Stephen Anderson, Directeur du Bureau de pays du PAM au Yémen. «Tragiquement, nous voyons de plus en plus de familles sauter des repas ou aller au lit le ventre vide, tandis que des enfants et des femmes tentent de survivre avec très peu pour se nourrir. Le PAM demande de l'aide de manière urgente afin de fournir de la nourriture aux sept millions de personnes en situation de grave insécurité alimentaire, qui risquent de ne pas pouvoir survivre à cette situation si elle devait perdurer».
 

La sécurité alimentaire

La grave insécurité alimentaire qui sévit dans le pays s'est nettement aggravée ces derniers mois, avec, selon certaines estimations, 65 pour cent des foyers qui seraient maintenant en situation d'insécurité alimentaire.
 

De plus, trois quarts de l'ensemble des ménages indiquent que leur situation économique a empiré depuis la crise. Les revenus ont baissé et plusieurs ouvriers du secteur public n'ont pas été payés depuis des mois. Compte tenu de cette situation, 80 pour cent des yéménites sont maintenant endettés et plus de la moitié de l'ensemble des ménages s'est retrouvée dans l'obligation d'acheter des produits alimentaires à crédit. De nombreux ménages (60 pour cent) ont adopté des mécanismes de survie néfastes, tels que le fait de manger moins de leurs aliments préférés, de réduire leurs portions ou encore de sauter des repas.
 

La malnutrition 


Les résultats de l'EFSNA indiquent que plus de 2 millions d'enfants souffrent de malnutrition aigüe. Dans quatre gouvernorats (Abyan, Al Hudaydah, Hadramaut et Taizz) les taux de malnutrition ont dépassé le seuil «d'urgence», ce qui signifie que les taux de malnutrition aigüe sont supérieurs à 15 pour cent.
 

Dans sept gouvernorats, à savoir Aden, Al Dhale'e, Al Jawf, Al Mahwit, Hajjah, Lahj et Shabwah, les taux dépassent maintenant le seuil dit «sérieux», ce qui signigie que les taux de malnutrition aigüe sont supérieurs à 10 pour cent.
 

L'agriculture


Le secteur agricole est la principale source de moyens d'existence pour au moins 60 pour cent des ménages yéménites. Les moyens d'existence de ce segment critique de la population ont été durement touchés avec une chute spectaculaire de la production agricole en 2016, par rapport aux niveaux atteints avant la crise.
 

Près d'1,5 million de ménages qui dépendent du secteur agricole souffrent à présent du manque d'accès aux intrants agricoles essentiels (tels que les semences, les engrais et le carburant pour l'irrigation) et ont besoin d'une aide agricole d'urgence. Parmi eux, 860 000 ménages qui travaillent dans la production animale souffrent du manque d'accès à l'alimentation animale (fourrage, concentré, filtres minéraux) et de nombreux ménages dépendants du bétail ont été forcés de vendre leurs troupeaux pour satisfaire leurs besoins domestiques.
 

Pendant ce temps, une lutte inadéquate contre les maladies céréalières et celles du bétail a contribué à dégrader un secteur agricole déjà en difficulté et dont il faut préserver les actifs de manière urgente.
 

Le travail de la FAO


En 2017, le travail d'urgence de la FAO se concentre sur quatre principaux domaines d'activité : fournir des kits et des outils agricoles, ainsi que des kits potagers et des systèmes d'irrigation aux ménages vulnérables afin d'améliorer l'accès des familles à l'alimentation. Il s'agit également de protéger d'urgence le bétail en vaccinant des millions d'animaux, d'apporter une aide d'urgence afin d'améliorer et de diversifier les revenus et les moyens d'existence avec des programmes de travail contre rémunération, des programmes d'élevage de volailles, d'apiculture et de pêche, de renforcer la coordination lors des interventions institutionnelles en faveur de la sécurité alimentaire et de l'agriculture, sans oublier la résilience.
 

La FAO demande de manière urgente 48,4 millions de dollars afin de renforcer son intervention et de venir en aide à 3 millions de personnes parmi les plus vulnérables du pays.


Le travail de l'UNICEF


Ces deux dernières années, l'UNICEF a financé le traitement de 460 000 enfants souffrant de malnutrition aigüe sévère au Yémen. L'Organisation consacrée aux enfants a également fourni a des enfants âgés de moins de cinq ans des suppléments vitaminiques et des vaccins, a distribué des médicaments et de l'équipement médical, des fournitures médicales et est venu en aide aux enfants blessés.
 

L'UNICEF a également participé a la rénovation et à la construction d'écoles, procédé a des transferts d'argent sans condition, fourni des kits d'hygiène aux personnes les plus vulnérables, du carburant pour faire fonctionner les sociétés d'eau et a mis en place des opérations de distribution d'eau pour les millions de personnes déplacées, y compris ceux pris au piège au milieu des combats à Taizz, à Saada et ailleurs.
 

L'UNICEF demande 237 millions de dollars de manière urgente pour poursuivre son travail au Yémen.


Le travail du PAM


Le PAM travaille à apporter un aide alimentaire d'urgence à près de sept millions de personnes au Yémen, par le biais de distributions directes de nourriture et de bons alimentaires. Le PAM apporte également une aide nutritionnelle aux femmes enceintes et allaitantes, ainsi qu'aux enfants à risque ou souffrant de malnutrition aigüe modérée.


Dans le cadre du lancement du Plan d'intervention humanitaire pour le Yémen en 2017, le PAM demande plus de 950 millions de dollars afin de pouvoir pleinement venir en aide à plus de sept millions de personnes cette année dans le pays.
 

Les résultats préliminaires de l'EFSNA ont été incorporés au Plan d'intervention humanitaire pour le Yémen en 2017, également paru aujourd'hui. Ces conclusions seront utilisées pour préparer le prochain Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC) pour le Yémen, qui devrait être publié en mars. Les résultats de l'EFSNA feront l'objet d'une autre analyse et un rapport final sera publié en mars. 

 

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